Marcel PEGUES
Souvenirs de la période de la guerre
1939-45
Formation du 143ème
Régiment d’Infanterie
Photo du recueil de souvenir de mon père
Réflexions sur le commandement du régiment
Souvenir de Prisonnier en Allemagne
Par Christian PEGUES (Mars 2008)
143 R.I. est formé à
Narbonne (11100), le 2 Septembre 1939.
Départ, le 12 Septembre1939
pour débarquer après 2 jours et 1 nuit de voyage à Essay-Maneroy (Meuse) (Essey-et-Maizerais
54470).
Puis à pied :
Ø
Saint
Julien sous les Cotes (55200) (30 km),
Ø
Flirey
(54470) (40 km),
Ø
Champy
(Pont à Mousson) (54700) 21 Septembre => on reste
21 jours,
Ø
Pommerieux
(57420) 13 jours,
Ø
Boulay
(57220)
29 Octobre au 10 Décembre,
Ø
Mazeroi
– Lihéons , Marieulles (57420), Pagny-sur-Moselle (54530),
on embarque pour
Ø
Gouzeaucourt
(Nord) (59231) 29 Décembre,
Ø
Sorel
le Grand (Somme) (80240) 1 mois,
Ø
Hagnecourt
(08430) 1 mois,
Ø
Retour
Sorel le Grand (Somme) 1 mois,
Ø
Saint
Python-Solennes (59730) 1 mois,
Ø
Graincourt
(62147) 1 semaine,
Ø
et
15 jours à Havrincourt (62147) pour garde auprès du
Général Lucas jusqu’au 13 Mai 1940 où l’on prend le train à Marcoing (59159) pour la Belgique.
Le 143 R.I était un régiment
de réserve, au passé lourd de gloire et de lauriers, formé en grand partie
d’agriculteurs du Midi (Aude, Hérault, Tarn, Aveyron, Pyrénées, …). Il était
composé d’hommes mûrs mais encore alertes, 30 ans de moyenne. Aussi fût-il
désigné, dès le début, pour couvrir la frontière de l’Est et monter la garde
dès la fin d’Octobre devant la ligne Maginot au nord de Boulay-Moselle (57220).
Là quelques camarades
commencèrent de tomber, 1ères victimes innocentes de la perfidie et
de la bassesse des hommes avides de pouvoir. Ayant remplit sa tâche vigilante,
il fût envoyé au repos dans le Nord, pour achever de s’aguerrir et s’entraîner,
alors que beaucoup de régiments d’active ou de jeunes étaient casernés
tranquillement et douillettement dans quelque cité de l’arrière ou sur la
frontière alpine. Au moment de l’attaque allemande, il se trouvait aux environs
de Cambrai, le quartier général de notre armée se trouvant à Havrincourt où
notre compagnie, la 1 ère, montait la garde auprès du Général Lucas.
Le 14 Mai 1940, vers 11 h du
soir, nous quittons Havrincourt pour la Belgique. Nous devons embarquer à
Marcoing vers 4h du matin. Aussi dans la nuit noire nous nous acheminons vers
la gare où nous devons trouver notre régiment et notre bataillon qui lui était
cantonné à Graincourt les Havrincourt (62147). Mais ici la faiblesse de
notre commandement commença à se faire sentir, d’ailleurs ce n’était pas la
première fois et à 10h, nous n’avions pas encore embarqués. Vers les 9h, nous
vîmes apparaître les 1èrs bombardiers Allemands qui venaient
incendier nos hangars et nos avions, labourer nos terrains d’atterrissages. Ils
évoluèrent majestueusement au-dessus de nous autres sans nous faire le moindre
geste, car sans doute nous n’étions pas une proie assez intéressante, pour le
moment du moins. Ils disparurent en direction de Cambrai, sans être aucunement
inquiétés comme si le beau ciel de France leur appartenait déjà (ils se
mitraillaient entre eux à blanc, pour faire croire à des combats à haute
altitude). Après 4 ou 5 h d’attente, vers les 11h nous embarquons enfin, mais comme
l’on craint une attaque aérienne imminente sur la gare, les derniers ne sont
pas encore montés que le train s’ébranle nous emportant vers notre destin sans
avoir rien pris depuis la veille.
Nous arrivons à Mons où le
train s’arrête quelques minutes, là nous constatons de nos propres yeux le beau
travail des aviateurs ennemis… nous arrivons à Tulize où nous devons débarquer.
Là, au lieu de s’empresser de débarquer et de rejoindre nos positions, l’on
discute, l’on hésite et tout à coup à l’horizon apparaissent les lourds
bombardiers allemands qui, cette fois, vont nous donner le baptême du
feu ; car, c’est sous le bombardement que nous sommes obligés à débarquer,
les bombes pleuvent çà et là sans faire aucune victimes chez nous, mais, les
pauvres civils ou réfugiés ne peuvent en dire autant (train de wagons
découverts plein de gosses).
Nous partons enfin vers nos positions à quelques 20km de là, lorsque, de nouveau, les avions ennemis réapparaissent, mais cette fois-ci, ils ne sont pas seuls et les petits chasseurs anglais viennent à notre secours. Contents, nous assistons, impassibles, au combat qui se déroule sur nos têtes. L’ennemi à l’avantage du nombre, mais les chasseurs sont intrépides et sans cesse reviennent à l’attaque, aussi parviennent-ils à chasser l’ennemi après en avoir abattus 2 qui tombent en flamme… Ironie du sort : ce fut, le 1ièr et le dernier combat qu’il nous fut permis de voir ! Pourquoi, par la suite, les petits chasseurs ne vinrent-ils pas à votre secours ? pour nous réconforter et nous délivrer des bombes ennemies.
Après une marche longue et
pénible, nous arrivons à Pied’Eau où se trouve les positions de la 1ière
Compagnie, vers les 10h du soir. Nous prenons un peu de repos bien
mérité ; car nous sommes paraît-il en 3éme position. La matinée
du 16 est parfaitement calme. Nous nous installons et nous nous organisons.
Lorsque vers les 2h, l’ordre arrive de terminer le plus rapidement possible les
tranchées–abrits, la situation devient de plus en plus sérieuse. Pourtant nul
bruit étranger ne vient troubler nos oreilles. Anxieux nous nous demandons ce
qu’il se passe. La nuit arrivera sans qu’aucune nouvelle ne vienne dissiper nos
craintes. Vers les 10h du soir, nous apprenons que les éléments motorisés du
régiment sont entrés en contact avec l’ennemi, mais loin devant nous. Qu’a donc
fait l’armée Belge ? Jusqu’à présent nous avions préparé le prêt au
bureau, nous pensions le distribuer le lendemain 17. mais ce vendredi, nous fut
funeste dans la nuit, nous changeons l’emplacement des roulantes et au petit
jour, vers les 4h, nous changeâmes à nouveau pour un endroit plus approprié à
quelques 200 m, derrière Charly sous Bois.
Déjà notre artillerie
donnait et toute la matinée, le canon gronda sans être inquiété par
l’artillerie allemande. Mais bientôt, elle entra en jeu et ce fut un véritable
enfer. Vers 9 h, les éclaireurs ennemis se montrèrent et l’un deux fut tué par
le camarade Vella ; d’autres réunis dans le château-ferme essuyèrent le
feu de notre mortier. Vers les 11h, une colonne ennemie fut signalée sur le
plateau opposé et vite démolie par le 3ème d’Artillerie et nos
tanks. La soirée se passa sous un duel d’artillerie qui ne devait se terminer
que très tard dans la nuit.
A 9h, l’ordre fut donné aux
roulantes de rejoindre le P.C. du Colonel, nous partions lorsque des camarades
de la 3ème d’Artillerie arrivèrent tout affolés, disant que l’ennemi
avait percé sur notre droite et nous encerclait. Malgré cela, il faut tenir
sous le feu et notre Compagnie ne faillira pas et tiendra jusqu’au 18 au matin
ou vers les 6h ne pouvant plus tenir, 2 sections se replièrent et réussirent à
tromper l’ennemi et à passer.
Quant aux 2 autres, elles se
défendirent vaillamment, il y eut des tués, de nombreux blessés, dont le Cne
Cnt la 1ère Compagnie Lieutenant Bérand et le Lieutenant
Chirnas. Les roulantes partirent donc le 17 au soir, vers les 10h, après avoir
servi la soupe à toutes les sections, on rejoignit le P.C. du Colonel, mais ne
trouvant personne, nous continuâmes notre chemin sous le feu des fusants qui
éclataient sur nos têtes (car entre-temps, l’ordre était arrivé au Poste
Principal du régiment, de se replier en vitesse), mais cet ordre ne fut pas
transmis au 1er Bataillon. Pourquoi ?
Vers les 3h du matin, nous
trouvâmes le 3ème Bataillon qui se repliait avec le Commandant
Quercy. Et ce fut la retraite, la pénible retraite qui devait se terminer
quinze jours plus tard à Dunkerque par Hennuyères (B-7090), Braine-le-Comte (B-7090), Soignies (B-7060), Bel-Air où nous nous reposons
2 ou 3h, Vieux-Conde (59690), Hergnies (59199), Odomez (59970), Saint Amand les Eaux (59230), Odomez, Saint Amand, Hasnon (59178) où la grosse bombe tomba au
milieu de la place, la Forêt de Raismes (59590) (20-21-22 Mai) où nous
prenons position durant 3 jours sous un bombardement incessant d’artillerie et
de bombes. Et toujours sans voir un avion français. Le dernier jour, nous nous
trouvons dans une poche de 4 km de lande, mais malgré des pertes, nous
réussissions à nous dégager par Brillon (59178) 24 Mai, Landas (59310) 25 Mai, Rumegies (59226) 26-27 Mai où nous prenons
position quelques jours, Lille (59000) 28 Mai, Bailleul (59270) 29 Mai où tout est détruit, gros bombardement, une à 10 m de moi,
Poperinge (Belgique) , Gyvelde (59254), Bray-Dunes (59123), Malo (59240), le Perroquet, la Panne, Petite-Synthe (59640) où on nous transporte en camion, Haut des Dunes, Fort de Mardyck (59279), Dunkerque (59140) le 1er Juin…
Le 4 Juin 1940, le 143ième
Régiment d’Infanterie est fait prisonnier à la Pointe de Gravelines, vers les
9h du matin, avec à sa tête le Général Allaurent, qui n’a pas voulu quitter ses
troupes alors qu’il aurait pu s’embarquer, et le Colonel Imbert. A partir de ce
moment commença un long calvaire qui devait durer une quinzaine de jours.
Nous partons vers 10h par
Bergues jusqu’à Rexpoède (60km), nous marchons durant 2 jours et nuit sans
arrêt, on ne nous donne rien à manger, nous arrivons vers les 4h du soir et
l’on nous donne un peu de pain et de fromage.
Départ le lendemain pour
Hazebrouck (59190) et Estaires (59940) (45km) où l’on arrive à 8 h
du soir – départ le lendemain matin 2h pour Lille (59000) (25km) où nous sommes très bien reçus par la population et le Croix
Rouge.
Départ le lendemain matin à
3h pour Tournai (B-7500) (42km) où l’accueil est
beaucoup moins enthousiaste. Départ le lendemain matin à 3h pour Renaix (B-9600) (25km), très bon accueil le 10 Juin (coup de
crosse dans côte), départ 3h du matin pour Enghien (B-7850) (25km),.le lendemain départ pour Halle (B-1500) 25km, le lendemain pour Warre (42km), très
mal reçus. Départ 4h pour Tirlemond (B-3300) (25km) où l’on prend le train pour faire 20km, on débarque à Saint
Tiénen à 2h et l’on repart à pied pour Tongeren (B 3700) (Tingres) 20km, le 16 Juin.
Le lendemain matin, départ
pour Maëstriels (canal Albert où le 17 Juin à 6h du soir l’on apprend que la France a ‘capitulé’ 25km.
Le 18 Juin ; départ pour Palenbery (Übach-Palenberg Allemagne), par Harslem (Hollande) où on nous distribue un bon sandwich. Au bout d’une 1/2h, on embarque pour Bacholt (H-VIE), on nous arrivons le 19 Juin vers midi
(vu 3 morts de fatigue au
cours de la route)
‘On ne prie pas pour un
droit, pour un droit, on lutte’ (A. H.)
Au camp : Nous y restons jusqu’au 2 Juillet.
Confiture de feuille de
betterave, fromage, margarine, soupe de blé.
La messe en
plein air.
28 Juin nous
envoyons de nos nouvelles.
J’ai eu un bon rhume tout le
chemin. - Un gardien part devant pour obliger les gens à mettre de l’eau sur le
bord de la route. - La charité de la population – Fatigués, harassés de
fatigue, il y en a un qui fonce à cheval sur nous, d’autres tirent à blanc.
* Duisburg-Meiderich : Camp "modèle" situé en
Rhénanie, non loin de la ville de Duisburg. S'agit-il du camp principal dont dépend
celui de Friedrichsfeld (dans lequel se trouvait mon arrière-grand-père, fait
prisonnier lors de la reddition de Maubeuge) situé à proximité ? (exploitation
métallurgique). (Extrait
d’un site Internet : http://prisonniers-de-guerre-1914-1918.chez-alice.fr/campsd.htm)
En Belgique : ordres de
repli non transmis ou non exécuté
Le Commandant Cros descend
le sergent Pélissier le 17 mai Pied’Eau : conduit le long de la voie
ferrée aurait dit que la position n’était pas bonne et aurait fait semblant de
reculer un peu en arrière (voir Bertrand).
Retraite en pagaye, Ordres
et contre-ordres se succèdent, on tue dans le dos, les réfugiés encombrent les
routes.
Traversée de Bailleul (59270) sous les bombes, embouteillage
formidable.
Bombes à 10m – abandon
roulantes sous bombardement aérien et terrestre en plein sur la route – on
fusille le chef de gare de Tergnier pour TSF dans sa cave et embouteillage de
trains en gare (gros bombardements) c’est son gosse papa ils ont tout cassé
dans la cave.
Les obus de l’Artillerie
sont tous mélangés.
Le lieutenant Allemand part
en congé en Octobre en France et nous rapporte l’Illustration et beaucoup de
journaux.
Voyage à Bochum en autocar –
Autostrade
14-15 Juin 1940 : attaque
sur D. , 30 Belges de tués.
Le Rhin gelé en Janvier et
Février 42, montagne de glace.
Les cloches et statue de
Guillaume II
………………………………………….
30 Mai 42 :
bombardement Cologne (beaucoup de victimes + de 1000 avions)
2 Juin 42 :
bombardement Hambon Mulhein => 22 Prisonniers de tués.
3 Juin 42 :
bombardement Duisb et Hamborn (clocher flambe, beaucoup bombe incendiaire.
20 Juillet : violent
bombardement Muers (église, hôpital, grosse bombe.
24 Juillet : gros
incendie + 2 bomb. de jour => 100 morts.
26 Juillet : Duisb et
Hamborn jour et nuit.
Août 42 : 41 alertes 5
en un jour le 1er Août.
…………………………………………………………………………………………
Délivré le 16 Avril 1945 par
les Anglais à 4h ¼ du soir à Lintzel (Lunebuy) à 40 km d’Hambourg.
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Après plusieurs mois dans un hôpital militaire Américain, mon père (Marcel PEGUES) a regagné la France et l’Aveyron où il a retrouvé sa famille (sa sœur Marie Louise).
Peu de
temps après son retour à Rodez (12000), il se
maria avec ma mère (Odette TIXIER) et ils eurent 5 enfants.
Pour mieux connaître sa
famille :
=>
Voir mon arbre généalogique (http://www.pegues.fr/)
Biographie
extrait : Cinq ans
prisonnier en Allemagne, par Frédéric Praud
parcours de prisonnier similaire (http://www.parolesdhommesetdefemmes.fr/spip.php?article51)